INTELLIGENCE ARTIFICIELLE : CONSULTATION DE LA CNIL SUR LES CAMERAS AUGMENTEES

20 janvier 2022

Le 14 janvier 2022, la CNIL a publié son projet de position relative aux conditions de déploiement des caméras augmentées dans les espaces publics. Ce projet est soumis à consultation publique pendant 8 semaines, jusqu’au 11 mars 2022.

Les points clés à retenir du projet de position de la CNIL :

  • Une position inédite sur la technologie de vision par ordinateur (computer vision) : pour la première fois, la CNIL se positionne sur cette technologie d’intelligence artificielle basée sur l’analyse algorithmique des flux vidéo. Soulignant l’hétérogénéité des cas d’usages, la CNIL délimite le périmètre de sa position :
    • aux dispositifs, fixes ou mobiles, déployés dans les espaces publics (et non les lieux privés ou non ouverts au public) ;
    • aux acteurs publics (la police par exemple) et aux acteurs privés (tels que des sociétés proposant des services pour la sécurisation des personnes et des biens en magasins, l’évaluation de la fréquentation dans les centres commerciaux, la mesure d’audience dans les panneaux publicitaires…) ;
    • aux dispositifs de vision par ordinateur, à l’exclusion de la technologie controversée de reconnaissance faciale.
  • Un appel explicite à une intervention du législateur : la CNIL remet entre les mains des pouvoirs publics le soin de légiférer en appelant à la tenue d’un débat démocratique. Elle adopte une vision pluridisciplinaire en évoquant les enjeux éthiques, techniques, économiques (politique publique de relance, emploi, souveraineté) et juridiques associés aux technologies de vision par ordinateur. Elle prône une approche graduée : « Un cadre juridique clair doit permettre de développer des technologies européennes compétitives incarnant de modèles protégeant la vie privée dès la conception (« privacy by design »), sur la scène nationale, européenne et internationale. [La CNIL] estime tout autant nécessaire de définir collectivement certaines « lignes rouges » à ne pas franchir. ».
  • Une interprétation stricte du cadre légal applicable aux traitements de données personnelles par des caméras augmentées :
    • Selon la CNIL, le Code de la sécurité intérieur (CSI) n’interdit ni n’encadre l’utilisation des caméras augmentées ;
    • Les traitements algorithmiques sur lesquels reposent les caméras augmentées sont soumis à la règlementation applicable en matière de données à caractère personnel, et ce même si les images sont anonymisées ou détruites très rapidement après leur captation et traitement ;
    • La CNIL illustre l’application des principes généraux du RGPD en la matière et liste utilement une série de mesures techniques recommandées afin de réduire les risques pour les personnes (floutage, anonymisation, traitement à bref délai…), et de recommandations pratiques sur les modalités d’exercice du droit à l’information (panneaux d’information, vidéos, codes QR…) ;
    • En particulier, la CNIL se penche sur l’application du droit d’opposition en matière de caméras augmentées et se positionne en faveur d’une intervention législative ou règlementaire afin de permettre le déploiement encadré des dispositifs en écartant le droit d’opposition, lorsque celui-ci ne peut être mis en œuvre. La CNIL considère enfin que le droit d’opposition n’est pas nécessaire en cas de traitement algorithmique à des fins statistiques, plusieurs conditions cumulatives étant alors nécessaires : des résultats agrégés et anonymes, un décalage temporel pour éviter un impact individuel, des statistiques fiables, et l’impossibilité d’un droit d’opposition.